3 Août 2013
J’en arrive aux annonces faites le 3 juin dernier par le gouvernement, et j’aurai au préalable, trois remarques à faire :
Premièrement, il nous semblé qu’il manquait une vision globale dans la manière d’aborder les questions. Nous avons le sentiment que les sujets sont saucissonnés, qu’on raisonne branche par branche, sans établir de liens entre-elles, et qu’on aborde les dépenses, sans parler en même temps des recettes.
Deuxièmement, la méthode nous paraît discutable. Face aux déficits, nous considérons que c’est à l’ensemble de la solidarité nationale de contribuer, et non aux seules familles avec charge d’enfant.
Enfin, la réponse au déficit de la branche famille aurait pu être traitée différemment compte tenu de son caractère artificiel. Ce déficit a été créé, vous le savez Mme la Ministre, par des transferts de dépenses initiés par les précédents gouvernements. Par ailleurs, c’est la seule branche structurellement excédentaire qui reviendra, à moyen terme, à l’équilibre sans avoir à baisser les dépenses, contrairement aux autres branches. Nous regrettons le choix qui a été fait de s’attaquer en priorité aux moyens de la politique familiale, alors que c’est une politique efficace et d’investissement.
Face à l’exigence du gouvernement d’un retour accéléré à l’équilibre financier de la branche famille, et face aux scénarios les plus contestables qui se profilaient, nous avons, dans un esprit de responsabilité, demandé au Gouvernement de privilégier certaines options - je les avais présentées aux Présidents d’UDAF et d’URAF, il y a deux mois - :
- des mesures réversibles, au retour de la croissance ;
- des solutions fiscales, qui permettent de redistribuer les efforts des ménages, de la manière la plus juste possible ;
- des mesures qui privilégient une simplification des dispositifs ;
- nous avons également demandé que l’équilibre entre les prestations et l’action sociale ne soit pas bouleversé : les familles ont tout autant besoin de prestations pour compenser leurs charges, que d’équipements et de services.
Dans ce cadre, nous nous sommes battus contre le projet le plus contestable qui était envisagé : à savoir l’introduction d’un critère de ressources pour les allocations familiales.
C’était la proposition phare du rapport Fragonard remis au Premier Ministre ! Elle avait tout pour plaire en apparence :
- elle maintenait soit-disant l’universalité en permettant à tous les allocataires d’en percevoir un bout, même réduit à une portion congrue ;
- et elle prévoyait un système de seuil dégressif rendant la sanction plus progressive.
Pour nous, c’était le pire des scénarios car il attaquait directement un principe essentiel de la politique familiale, et plus largement de la sécurité sociale : celui de la solidarité horizontale.
Certes ce n’était pas la première fois que cette proposition ressurgissait, mais cette fois-ci, elle semblait bien engagée. Tout semblait joué. Et pourtant …C’était sans compter la mobilisation du Mouvement familial. Nous n’avons pas baissé les bras ! Partout en France, chers amis, vous êtes intervenus pour faire de la pédagogie, pour convaincre les décideurs publics. Vos actions auprès des Préfets, des élus locaux et des médias ont été des compléments précieux à celles que nous avons menées au plus haut niveau, auprès du Premier Ministre et du Président de la République en personne.
Je tiens à renouveler mes remerciements à tous ceux qui se sont mobilisés contre ce projet. Notre travail de persuasion a payé : nous avons été entendus. Le Président de la République et le Premier Ministre, que j’ai rencontré à plusieurs reprises ces dernières semaines, ont finalement renoncé à ce projet. Je les remercie, par votre intermédiaire, Mme la Ministre, d’avoir pris en compte nos arguments.
Face à notre opposition, le Gouvernement a finalement opté pour la baisse du plafond du quotient familial à 1 500€. 12 % des familles avec charge d’enfants seront concernées. Le principe du quotient familial est préservé et les effets sur les familles seront moindres qu’avec une modulation des allocations. Mais c’est un coup dur : elles seront à nouveau mises à contribution, alors que le plafond avait déjà été abaissé l’an dernier.
Nous regrettons l’annonce de la réduction de la PAJE et du montant du CLCA majoré, des décisions qui nous semblent contradictoires avec les efforts du Gouvernement destinés aux parents de jeunes enfants. La baisse du montant de la PAJE va toucher durement des familles concernées : un couple avec 2 enfants gagnant au total 4 000 euros par mois va perdre plus de 1 100 euros par an, avec cette seule mesure.
En revanche, bien sûr, nous saluons la majoration de 50% du complément familial pour les familles modestes, ainsi que la revalorisation de 25 % de l’allocation de soutien familial.
Au total, pour résorber rapidement le déficit de la branche famille, les efforts demandés se traduiront par 1,7 milliards d’économies. C’est un sacrifice très important demandé aux familles, alors qu’elles contribuent largement à la solidarité nationale par leurs cotisations et par leur impôt, et par le renouvellement des générations qu’elles assurent.
Lorsque la branche redeviendra excédentaire, il appartiendra au gouvernement de soulager la pression sur les familles.
Parmi les mesures annoncées, l’une d’entre-elles est particulièrement choquante : il s’agit de lasuppression de la réduction d’impôt pour frais de scolarité dans le secondaire. Cette mesure va augmenter les impôts de toutes les familles - surtout les familles nombreuses - à des âges où les charges augmentent pour elles. Les familles imposables dont les ressources sont situées au dessus du plafond de l’allocation de rentrée scolaire - soit 1 900€ € par mois pour une famille de 1 enfant - ne bénéficieront pas de la revalorisation de cette allocation, et en plus, subiront une hausse d’impôt de plusieurs centaines d’euros. Ainsi des familles à revenus modestes seront touchées ! Sans compter le risque de faire entrer dans l’impôt, des familles jusqu’alors non imposées. Pour toutes ces raisons, nous demandons le retrait de cette mesure inacceptable.
En revanche, nous avons accueilli très favorablement l’annonce d’un plan ambitieux de création de 275 000 places d’accueil de petite enfance pour les 5 ans à venir, et le développement de l’aide à la parentalité. Elles répondent aux attentes des familles, et viennent conforter l’action des UDAF et des associations familiales, dans ces domaines.
Ces mesures très positives trouveront leur traduction dans la future convention d’objectifs et de gestion passée entre l’Etat et la CNAF. Ainsi les moyens de cette convention devraient progresser de 7,5 % par an, entre 2013 et 2017. Ils permettront notamment de financer les créations de 100 000 places de crèches. Il nous faudra, toutefois, être vigilants sur la traduction concrète de ces annonces, en particulier sur le nombre de places d’accueil, dont la création dépend aussi des communes.
Un point nous préoccupe : celui de la réforme des rythmes scolaires, et de son impact pour les familles. De larges zones d’incertitudes demeurent quant aux financements, au niveau de la contribution supportée par la branche famille, et à la manière dont ces services seront proposés aux familles. Nous craignons des inégalités importantes entre les communes, selon leur capacité de financement. Les familles risquent, là encore, de voir leur pouvoir d’achat amoindri en étant mise à contribution soit directement, soit indirectement via la fiscalité locale.
Il faut également que les moyens dévolus à la branche famille pour mener ces politiques, soient à la hauteur des enjeux et de la qualité du service attendue par les familles.
Mme la Ministre, nos militants familiaux sont présents dans les organes de gestion des CAF. Ils vous alertent sur les contraintes très fortes qui pèsent sur les personnels et sur la nécessité d’y apporter des réponses dans le cadre de la future COG, par le maintien des emplois. Par ailleurs, nous aurons une attention particulière sur l’évolution des dotations d’action sociale dévolues aux CAF.